PENSER A LA SOUFFRANCE

Je suis né dans les années 70 et j’ai grandi avec ce mythe d’une consommation glorieuse, réjouissante, source de joie et de bonheur, d’élévation, faiseuse d’emplois, amonceleuse de richesses. La nourriture posée au centre de notre table semblait également se conformer à cette croyance dans une douce abondance. La viande ou le poisson présent à chaque repas, pouvait en témoigner. Après tout, n’étions-nous pas ce suprême prédateur, juché fièrement en haut de la pyramide alimentaire, légitimé par une des plus archaïques lois de la Nature ? Saucer ou être saucé !
Mais, aujourd’hui, au vu de l’état honteux et pitoyable du monde qui nous entoure, à l’écoute de la souffrance infinie d’une sphère à l’agonie, souffrance infligée, souffrance instrumentalisée dans une course au profit illimitée, il m’est difficile de ne pas être touché au plus profond de mon être. De suprême prédateur, à suprême tortionnaire, voilà la triste image que me renvoit le visage de cette terre en peine. Il nous aura été assez facile de croire que ces espèces jugées comme inférieures, comme dénuées de toute intelligence et de toute sensibilité pouvaient être à ce point maltraitées, un mal nécessaire à la survie de notre espèce dominante. Juges et parties… et finalement bourreaux de toute forme de vie jusqu’à la nôtre.
Vais-je donc prendre mon bâton de pèlerin vegan et vous exhorter à en faire de même ? Vais-je bannir viandes et poissons de mes pensées gourmandes passées et futures ? Non, pas encore, même si mon cœur me souffle qu’il est possible d’alléger la charge de ces tourments. Dans ce que nous achetons, dans ce que nous mettons dans notre panier, là réside notre réel pouvoir, l’aurions-nous oublié ? Alors je rêve d’un monde raisonné et raisonnant où l’abondance ferait place à un peu plus de frugalité.  J’imagine une sobriété gourmande, où les protéines animales ne s’inviteraient plus de manière automatique à notre table, où nous aurions cette envie et cette capacité à leur redonner une vraie valeur, celle de leur rareté, de la qualité de leurs filières d’élevage, de la valorisation de leurs artisans qu’ils soient bouchers, poissonniers ou restaurateurs, un monde où une belle pièce de viande ou de poisson serait un bien précieux, extra-ordinaire, une fête partagée, un don de la nature, un monde où il n’y aurait, ce soir, pas de souffrance à notre table.

apostrophes alone2Potimarron grillé, fromage de brebis, sauge, ail et noisettes torréfiées.

Pour 4 personnes :

1 potimarron de taille moyenne (issu de l’agriculture biologique)

1 petit fromage de brebis (ou de chèvre)

1 petite gousse d’ail

5 feuilles de sauge

10 noisettes

Huile d’olive

Sel, Poivre

Potimarron grillé

Préchauffer votre four à 180°C. Eviter l’air pulsé, privilégier une chaleur statique. Laver le potimarron, le couper en deux. A l’aide d’une cuillère, vider les graines et les parties filandreuses. Sans le peler, couper le potimarron en quartiers de 2 à 3 centimètres d’épaisseur. A l’aide d’un pinceau, huiler le fond d’une plaque ou d’un plat allant au four. Déposer les morceaux bien à plat en évitant les empilements. Le contact de la chair avec la surface est impératif pour une cuisson uniforme. Avec votre pinceau, huiler les parties supérieures des morceaux de potimarron. Cette étape est également primordiale pour encourager la cuisson et éviter le dessèchement. Saler, poivrer et enfourner pour 30 minutes.

Huile sauge et ail

Hacher l’ail et la sauge fraîche et les faire infuser dans de l’huile d’olive chaude mais pas brûlante. L’ail et la sauge ne doivent pas réellement cuire. Vérifier la présence de petites bulles, laisser cuire à feu doux quelques minutes et réserver hors du feu.

Noisettes torréfiées

Concasser et hacher les noisettes au couteau. Les faire torréfier dans une poêle sèche en remuant régulièrement. Réserver.

Dressage

Vérifier la cuisson du potimarron à l’aide d’une pointe couteau. Il doit être tendre, presque compoté. Disposer les morceaux de potimarron, de fromage, arroser d’huile à la sauge et parsemer de noisettes grillées.